Contexte et portée du jugement
Le tribunal judiciaire de Paris a estimé que TotalEnergies et sa filiale Électricité et Gaz avaient publié sur le site totalenergies.fr des allégations environnementales susceptibles d’influencer le comportement d’achat des consommateurs et de les induire en erreur, faute pour le groupe d’avoir précisé explicitement qu’il disposait de son propre scénario pour atteindre la neutralité carbone et qu’il poursuivait parallèlement à accroître ses investissements dans le pétrole et le gaz.
Selon le jugement, en visant l’objectif de neutralité carbone tel que prévu par l’Accord de Paris, le groupe ferait croire au consommateur qu’il se réfère aux préconisations de la communauté scientifique alignées sur cet accord, qui recommande une réduction immédiate de la production d’énergies fossiles.
Engagements climatiques jugés mensongers
Le tribunal juge que les engagements environnementaux affichés par TotalEnergies sur son site et dans sa communication commerciale relevaient d’allégations susceptibles d’altérer le comportement d’achat et d’induire en erreur, faute pour l’entreprise de préciser clairement son propre scénario et sa trajectoire de transition.
Décision et réactions
La juridiction civile a en revanche rejeté les demandes des associations concernant les allégations relatives au gaz fossile et aux agro-carburants, estimant qu’elles ne constituaient pas de publicité. Elle n’a pas non plus condamné l’entreprise sur sa communication institutionnelle ni sur ses publicités passées relatives à la vente d’électricité et de gaz, ce dont le groupe s’est félicité.
« TotalEnergies SE prend acte du jugement du tribunal judiciaire de Paris qui a rejeté l’essentiel des demandes formulées à l’encontre de TotalEnergies SE, en particulier celles relatives à la communication institutionnelle », a indiqué le groupe dans un communiqué, sans préciser s’il ferait appel.
Réactions des ONG et implications juridiques
Les ONG Greenpeace France, Les Amis de la Terre France et Notre Affaire à tous avaient saisi le tribunal en 2022 et laissent noter ce que ces acteurs décrivent comme un précédent juridique majeur contre la désinformation climatique des majors pétrolières et gazières. Elles estiment que la décision renforce la jurisprudence sur le greenwashing, tant en France qu’en Europe et au-delà.
Selon l’ONG ClientEarth, « ce jugement serait le premier jugement mondial à estimer qu’un grand groupe pétrolier et gazier a trompé le public en verdissant son image ». Des exemples récents d’écoblanchiment ont été mis en évidence par d’autres juridictions et régulateurs européens, notamment des condamnations envers KLM en 2024 et Lufthansa en mars, ainsi que d’autres entreprises dans l’alimentation et d’autres secteurs.
« Ce jugement historique envoie un avertissement aux autres majors pétrogazières d’Europe et d’ailleurs : affirmer faire partie de la transition tout en développant de nouveaux projets fossiles a désormais un prix judiciaire établi », a réagi Johnny White, juriste chez ClientEarth.
