Gabriel Galice: la paix ne se décrète pas, elle se constate — analyse du cessez-le-feu et du rôle de l’ONU

Contexte et premières évaluations du cessez-le-feu

Gabriel Galice estime que la suspension des massacres constitue une avancée indéniable, mais il pointe des zones d’ombre: l’ONU n’a pas été consultée et la notion de protection des populations n’a pas été invoquée. Selon lui, l’accord aurait été négocié entre Donald Trump et Benyamin Netanyahou, deux dirigeants qui, affirme-t-il, ne disposent pas d’un passé clairement consacré à la paix.

Il rappelle également que les États‑Unis auraient envisagé d’envoyer des forces pour superviser le cessez-le-feu, une prerogative habituellement dévolue aux Nations unies. « Ce n’est pas la compétence de Washington de ramener la paix dans le monde », insiste-t-il.

Plus tôt, l’armée israélienne avait annoncé l’entrée en vigueur du cessez-le-feu à Gaza et le retrait des soldats de plusieurs zones.

Le jeu trouble des acteurs diplomatiques

Un mois à peine avant l’annonce, Israël avait bombardé les négociateurs du Hamas à Doha, ce qui n’est pas perçu comme un signe de confiance totale. Gabriel Galice évoque également « le jeu trouble » de certains acteurs, Tony Blair étant cité comme potentiel superviseur de la seconde phase du plan.

Du côté du Hamas, Israël le décrit comme « détruit », mais l’expert invite à la prudence. « Quand on tue un combattant, on en fabrique dix », affirme-t-il, soulignant que la logique de la violence se nourrit d’elle-même. Il faut attendre pour voir si la libération des otages israéliens sera suivie d’actes équivalents, comme une éventuelle libération de Marwan Barghouti, ce qui constituerait un vrai signe d’ouverture. Pour l’heure, ce n’est pas le cas.

« La paix ne se décrit pas comme un simple accord, elle se constate. C’est une vertu, un état d’esprit de confiance. Et à Gaza, la confiance a été détruite », rappelle Gabriel Galice, président de l’Institut international de recherche pour la paix à Genève.

Au-delà du cessez-le-feu: quelle issue pour la question palestinienne ?

La question palestinienne demeure entière. « Où va-t-on mettre les Palestiniens ? » s’interroge le spécialiste. La Cisjordanie continue d’être grignotée quotidiennement par des colonies soutenues par l’armée israélienne, et certains ministres du gouvernement Netanyahu tiennent des propos jugés suprémacistes, selon lui.

Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est, selon lui, un enjeu fondamental. « La paix ne se décrète pas dans un accord, elle se constate. C’est une vertu, un état d’esprit de confiance. Et à Gaza, la confiance a été détruite ».

Renforcer le rôle de l’ONU dans un processus émaillé par les véto

Face à un processus de paix piloté par les États‑Unis, l’expert appelle à réhabiliter le rôle de l’ONU. « Ce n’est pas l’institution qui est en cause, mais l’usage qu’en font les grandes puissances qui ont bloqué sa machinerie depuis la fin de la guerre froide », affirme-t-il. Plusieurs résolutions appelant à un cessez-le-feu à Gaza ont été bloquées par le veto américain, la dernière en date remontant au 19 septembre.

À Gaza, la population aspire avant tout à survivre après deux ans de guerre. « Les peuples savent qu’ils paient la guerre: le sang, les impôts, les conditions de vie ou la mort. Et donc les peuples ne sont ni idiots ni masochistes. Globalement, ils veulent vivre, tout simplement ». Pour l’heure, dans les ruines de Khan Younès ou de Rafah, la paix n’a pas encore été une réalité.

Propos recueillis par Pietro Bugnon/hkr